Paris aime Martin Margiela à la folie
13 novembre 2020
Paris met Martin Margiela à l’honneur durant deux saisons, à travers deux expositions, l’une au Palais Galliera1, et l’autre au Musée des Arts Décoratifs. La première offre une rétrospective complète de sa carrière, la seconde retrace ses années de collaboration avec la maison Hermès.
Martin Margiela s’offre Paris pour deux saisons
Martin Margiela a investi le Palais Galliera où l’exposition “Margiela / Galliera” retrace l’histoire de sa maison, depuis sa première collection en 1989, jusqu’à la dernière en 2009. L’autre exposition, intitulée “Margiela les années Hermès” se tient au Musée des Arts Décoratifs, et se concentre sur la période 1997-2003, l’époque où le couturier avait en charge les collections de prêt-à-porter féminin d’Hermès.
Martin Margiela, une biographie sans faute
Chef de file de l’école d’Anvers, Martin Margiela sera le seul couturier de ce mouvement majeur de la mode des années 80 à s’établir à Paris. Après avois travaillé auprès de Jean-Paul Gaultier de 1984 à 1987, il y fonde sa maison en 1988, et présente une première collection Martin Margiela pour le printemps-été 1989 au Café de la Gare. Il va imposer sa griffe et son style pendant vingt ans et quarante collections.
La griffe Margiela, une mode conceptuelle
Le style Margiela remet autant en question l’esthétique du vêtement que son processus de création. Pour le couturier, la mode ouvre un champ de recherche infini, qui va bien au-delà des limites imposées par la couture, pour s’inscrire dans un processus artistique ou revendicatif.
Margiela à contre-courant
Margiela, le chercheur, fait défiler des mannequins dont le visage est recouvert d’un voile de nylon, pour mieux concentrer l’attention du spectateur sur le vêtement. Il prend ainsi le contre-pied d’une époque qui a élevé les mannequins au rang de super stars. Il peut aussi choisir de faire défiler des mannequins non professionnels, issus de son entourage, de tout âge, et dont les physiques échappent aux standards imposés par la mode ; leur trait commun n’est pas de se ressembler, ni d’appartenir à la même génération, mais de s’habiller de la même manière. Martin Margiela va beaucoup travailler les carrures ; là encore, il est à contre-courant, en les voulant étriquées dans une époque, les années 80, qui apprécie des vêtements aux épaules très larges.
Les défilés Margiela, des événements soigneusement orchestrés
Margiela décline son style en quarante défilés, conçus comme des événements participant à mieux le définir. La mode Margiela ne peut logiquement rester confinée dans des lieux classiques. Pour chaque défilé, l’endroit choisi fait partie d’un tout, d’un scénario soigneusement construit. Les collections sont présentées dans des lieux atypiques, parking, station de métro fantôme, entrepôt, salle de vente de l’Armée du Salut, terrain vague, café-théâtre, etc. Les mannequins défilent dans des ambiances olfactives et sonores inhabituelles, sur fond de senteurs de patchouli, ou au rythme d’un bruit étrange, celui de leurs talons perçant le carton ondulé recouvrant le podium.
Quand Martin Margiela créait l’événement…
Pour sa collection printemps-été 1990, Martin Margiela pousse le jeu un peu plus loin, en organisant, ou plutôt en désorganisant, son défilé dans un terrain vague du 20e arrondissement de Paris. Les invitations avaient été griffonnées sur des morceaux de cartons par les petits poulbots du quartier. Premiers arrivés sur place, ce sont eux qui occupèrent les premiers rangs et non la presse. Les critiques ne comprirent pas la démarche du créateur ; ils voulaient simplement dire que la mode n’appartenait pas à une élite triée sur le volet, mais était l’affaire de tous !
1. Margiela / Galliera, du 3 mars au 15 juillet 2018 au Palais Galliera.
2. Margiela, les années Hermès, du 22 mars au 2 septembre 2018 au MAD.